Planification fiscale de fin d’année 2025 pour les propriétaires d’entreprise

24 novembre 2025 | Jean Marchand


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Des opportunités de réduire vos impôts et ceux de votre société

Planification fiscale de fin d’année 2025 pour les propriétaires d’entreprise

Une société est généralement en mesure de choisir sa fin d’année d’imposition à sa discrétion, sous réserve de certaines exceptions. Alors que la fin d’année de votre société approche à grands pas, prendre un peu de temps pour revoir sa situation financière et mettre en œuvre quelques stratégies de planification fiscale pourrait vous valoir des économies d’impôt importantes. Pour que vous ne laissiez rien au hasard, voici un résumé de quelques-unes des stratégies de planification fiscale de fin d’année les plus courantes pour les propriétaires d’entreprise constituée en société.

Toute mention de conjoint dans cet article réfère aussi bien à un conjoint légalement marié qu’à un conjoint de fait.

Ventes à perte à des fins fiscales

Si le portefeuille de placements de votre société comportait des titres dont la valeur s’était dépréciée et qui n’étaient plus en adéquation avec sa stratégie de placements, il se pourrait que vous envisagiez de les vendre avant la fin d’année d’imposition de votre société afin de réaliser des pertes en capital. Cette stratégie, désignée de vente à perte à des fins fiscales, qui consiste à vendre des titres à perte pour compenser des gains en capital réalisés durant l’année, est une technique couramment utilisée de planification fiscale de fin d’année. Vous devriez considérer tous les frais, y compris les frais d’opération, avant de les vendre uniquement dans le but de donner lieu à une perte fiscale.

Lorsque vous vendez un placement, la vente, pour les besoins de l’impôt canadien, sera réputée avoir eu lieu à la « date de règlement ». Si la fin d’année de votre société était le 31 décembre et en supposant un délai de règlement d’un jour, vous devriez engager l’opération au plus tard le 30 décembre 2025, pour les opérations sur valeurs canadiennes et américaines, afin que le règlement ait effectivement lieu en 2025. En ce qui concerne les fonds communs de placement, veuillez consulter votre conseiller RBC pour les dates de règlement.

Considérer les règles sur la minimisation des pertes

S’il était de votre intention de racheter tout placement vendu à perte par votre société, il serait important que vous vous assuriez que les « règles de minimisation de pertes » ne s’appliqueront pas. Ces règles pourraient s’appliquer lorsque votre société vend à perte un bien (par exemple des actions ou des fonds communs de placement) puis qu’elle, ou une tierce partie, rachète un bien identique dans les 30 jours suivants et continue de le détenir au 30e jour. Si les règles de minimisation de perte s’appliquaient, la perte serait suspendue (ne pourrait être utilisée) dans votre société jusqu’à ce que celle-ci ou la tierce partie cède le bien identique à un tiers non affilié (c.-à-d. au marché).

Considérer les ajustements au compte de dividendes en capital (CDC)

S’il était de votre intention de réaliser une perte en capital dans votre société, il pourrait s’avérer avantageux de verser des dividendes en capital avant de réaliser la perte en capital à condition que le solde de votre CDC soit positif. Il est essentiel de déterminer précisément le solde du CDC de votre société avant de verser des dividendes en capital. Si votre société versait un dividende en capital qui excédait le solde de son CDC, elle pourrait être assujettie à un impôt additionnel. Il est fortement recommandé de demander à un conseiller fiscal qualifié de calculer soigneusement le solde du CDC à un moment spécifique dans le temps avant de verser un dividende en capital.

Considérer un report prospectif ou un report rétrospectif de pertes en capital

La perte en capital doit d’abord être appliquée à tout gain en capital (incluant les gains en capital issus de distributions de fonds communs de placement) réalisé dans l’année courante. Toute perte en capital inutilisée (c.-à-d. qui ne peut être utilisée pour compenser des gains en capital de la même année) peut être reportée aux trois années précédentes et portée en diminution des gains en capital de ces années-là ou reportée à n’importe quelle année suivante pour être portée en diminution de gains en capital imposables réalisés dans une année future. Si votre société appliquait rétroactivement une perte nette en capital à un gain en capital d’une année précédente, celle-ci réduirait son revenu imposable pour l’année précédente en cause. Cette réduction pourrait entraîner un remboursement d’impôt déjà payé.

Demander la réserve pour gains en capital

Si votre société avait déjà vendu ou prévoyait vendre des biens en immobilisation en 2025, vous pourriez être en mesure de reporter une partie du gain en capital et des impôts y associés en demandant la réserve pour gains en capital, pourvu que vous receviez le produit de la vente sur plusieurs années. Vous pourriez alors normalement distribuer le gain en capital sur un maximum de cinq ans.

Demander la réserve pour revenus d’entreprise

Si votre société avait vendu des marchandises ou des biens immobiliers, classifiés comme étant de l’inventaire en 2025, et que le produit de la vente n’était attendu qu’après la fin de l’année d’imposition, vous pourriez être en mesure de demander la réserve pour les bénéfices provenant de la vente et de reporter l’impôt y associé sur un maximum de trois ans.

Verser les salaires avant la fin de l’année

Vous pouvez envisager de vous verser, avant la fin de l’année d’imposition de la société, ainsi qu’aux membres de votre famille qui travaillent dans votre entreprise un salaire additionnel ou une prime. Ce versement de fin d’année constitue un revenu gagné qui pourrait générer des droits de cotisation à un REER l’année suivante. Le paiement de salaire vaudra-t-il à l’entreprise une déduction fiscale et il permettra aussi aux membres de votre famille de gagner un revenu aux fins du REER, du RPC/RRQ et des frais de garde. Le salaire versé devra être raisonnable et être fonction des services fournis par vous-même et les membres de votre famille au sein de l’entreprise. En règle générale, il s’agira de leur payer un salaire que vous auriez pu verser à une personne qui ne vous est pas apparentée pour le travail effectué dans l’entreprise.

Déclarer une prime d’ici la fin de l’année

Si vous souhaitiez diminuer les revenus de votre société sans pour autant augmenter vos revenus personnels dans l’année d’imposition actuelle, vous pourriez songer à vous déclarer une prime avant la fin de l’année d’imposition de votre société et vous verser la prime au plus tard dans la période de 180 jours suivant la date de sa fin d’année. Ceci permettra à votre société d’obtenir une déduction fiscale pour l’année en cours et vous ne seriez tenu d’inclure la prime dans vos revenus personnels que dans l’année de sa réception.

Verser des dividendes avant la fin de l’année

En vue d’un fractionnement de revenu, vous pourriez envisager de verser des dividendes à des adultes membres de votre famille qui sont actionnaires de votre société et qui se trouvent dans une tranche d’imposition peu élevée. Si ceux-ci n’avaient aucun autre revenu, ils pourraient recevoir ces dividendes sans qu’ils ne soient assujettis à l’impôt, étant donné l’exemption personnelle de base. Le montant qui pourra être reçu en franchise d’impôt variera selon la province ou le territoire de résidence et selon que les dividendes versés par la société soient des dividendes déterminés ou non déterminés. Attention cependant aux règles de l’impôt sur le revenu fractionné (IRF) qui pourraient compromettre cette stratégie.

Acquisition de biens pour votre entreprise

Si vous aviez l’intention d’acquérir des biens pour votre entreprise (p. ex., ordinateur, mobilier et matériel), vous devriez songer à effectuer ces achats avant la fin de l’année. Si les biens étaient utilisables, ces achats de fin d’année permettraient à l’entreprise de demander la déduction pour amortissement (DPA) à l’égard de ces biens. Pour la plupart des biens, la moitié de la DPA normale admissible pourra être demandée la première année pour les besoins de l’impôt, et ce, indépendamment du moment de l’achat dans l’année.

Rembourser un prêt d’actionnaire reçu de votre société

Si votre société vous avait consenti un prêt, assurez- vous de rembourser le prêt avant la fin de son année d’imposition suivant celle de l’octroi du prêt pour éviter d’avoir à inclure la valeur du prêt comme revenu sur votre déclaration de revenus personnelle.

Dons de titres en nature

Que vous ayez conclu un engagement philanthropique ou souhaitiez tout simplement aider un organisme de bienfaisance enregistré, vous pourriez envisager de faire un don en nature de titres à partir de votre société, et ce, particulièrement si celle-ci ne disposait pas des liquidités suffisantes pour faire un don en espèces. Il pourrait s’agir d’une stratégie de dons efficace, particulièrement si votre société détenait des titres en position de gains en capital importants. En effet, lorsque votre société fait un don de titres en nature, elle bénéficie non seulement de l’élimination du gain en capital accumulé sur le titre, mais elle bénéficie également d’une déduction de l’impôt sur les sociétés en fonction de la valeur des titres donnés. Cette déduction pourrait aider à réduire le fardeau fiscal de votre société.

De plus, la pleine valeur du gain en capital éliminé s’ajoute au CDC de votre société. Cela augmentera le montant qui pourra être versé en franchise d’impôt aux actionnaires de la société. Si les titres donnés par votre société se trouvaient en position de perte en capital, celle-ci pourrait toujours en bénéficier en demandant la perte en capital de même que la déduction pour dons de bienfaisance.

Avant de procéder avec un don en nature, il serait important de contacter l’organisme de bienfaisance enregistré afin de vous assurer qu’il est en mesure d’accepter de tels dons.

Bien qu’il n’y ait aucune limite quant au montant de dons que votre société pourra faire dans une année, aux fins de l’impôt, une société ne pourra généralement demander une déduction pour ses dons de bienfaisance que jusqu’à concurrence de 75 % de ses revenus nets de l’année. Si votre société ne pouvait demander l’intégralité de ses dons dans une seule année, elle aurait jusqu’à cinq ans pour reporter les dons non réclamés.

Considérer des choix de placements fiscalement avantageux

Le gouvernement offre des incitatifs fiscaux visant à encourager les investissements dans certains secteurs de l’économie. Par exemple, les placements accréditifs pourraient procurer à votre société des déductions d’impôt susceptibles de réduire son fardeau fiscal global.

Bien qu’il soit important d’évaluer les placements en fonction de leurs mérites fiscaux, vous devez aussi considérer d’autres facteurs tels que le risque du placement, la diversification, l’opportunité pour une appréciation du capital, la liquidité, etc. À cet égard, il est important de reconnaître que les placements accréditifs sont considérés comme des placements à risque élevé et doivent typiquement être détenus pendant une période déterminée. De plus, certains placements, comme les sociétés de commandite, nécessitent des déclarations de revenus plus complexes. Vous devriez tenir compte de toute restriction et des complexités accrues en termes de déclaration de revenus au moment d’évaluer si un placement peut convenir à votre société.

Envisager un régime de retraite individuel (RRI)

Un RRI est un régime de retraite enregistré à prestations déterminées, établi et parrainé par votre entreprise. Celui-ci est souvent établi afin de bonifier les prestations de retraite d’employés clés ou pour vous, le propriétaire de l’entreprise, étant donné qu’il peut vous accorder plus de droits de cotisation annuels qu’un régime enregistré d’épargne-retraite (REER). Les bénéfices d’un RRI peuvent aussi être accordés à votre conjoint ainsi qu’à d’autres membres de votre famille en autant qu’ils soient aussi employés par votre société.

Les cotisations à un RRI offrent une déduction fiscale immédiate à votre société et sont exemptées des charges sociales et des taxes pour les services de santé. Cette déduction pourrait aider à réduire l’impôt à payer de votre société pour l’année d’imposition en cours. Votre société pourrait déduire, aux fins de l’impôt, ses cotisations de l’année à votre RRI ainsi que celles versées jusqu’à 120 jours après la fin de son année d’imposition. Pour être déductibles, celles-ci devront se rapporter au service dans l’année d’imposition en cours ou d’une année précédente. Les cotisations en lien avec le service postérieur à la fin de l’année d’imposition ne seraient pas déductibles de l’impôt. Les honoraires de gestion de placements pourraient aussi être déductibles s’ils étaient versés par votre société à un récipiendaire externe.

En plus de la déduction de l’impôt des sociétés, un RRI recèle d’autres avantages possibles. En effet, l’impôt des particuliers est reporté et n’est payable que lors de la réception de prestations dans une année future (possiblement lorsque vous vous trouverez dans une tranche d’imposition moins élevée). De plus, vous pourriez fractionner vos prestations de retraite de votre RRI avec votre conjoint, ce qui réduirait le fardeau fiscal global de votre famille. Enfin, les actifs dans un RRI seraient généralement à l’abri de vos créanciers advenant que votre entreprise connaisse des difficultés financières. En bref, un RRI pourrait vous permettre de vous constituer une épargne- retraite importante, et ce, en report d’impôt tout en protégeant ces actifs des créanciers de votre société.

Gestion des revenus de placements passifs

Le fait de gagner des revenus de placements de plus de 50 000 $ dans votre société (ou dans toute société affiliée, incluant une société de portefeuille) pourrait miner l’accès de votre société au plafond des affaires d’une petite entreprise pour l’année suivante. Toutefois, il existe des solutions pour minimiser l’impact de ces règles, ainsi en diminuant les revenus passifs gagnés cette année dans votre société et/ou en reportant/ reconnaissant des revenus passifs à des années futures. Par exemple, vous pourriez envisager :

  • de réclamer des dépenses comme des frais de gestion de placements et l’intérêt payé sur un prêt à des fins de placement afin de réduire les revenus passifs de votre société.
  • des stratégies pour réduire vos actifs générant des revenus passifs ou de retirer des liquidités excédentaires de votre société, ainsi en versant des dividendes en capital libres d’impôt à vos actionnaires ou en remboursant des emprunts d’actionnaires ou en remboursant des actionnaires pour des dépenses d’affaires payées à même leurs fonds personnels.
  • des stratégies de placements de sociétés destinées à réduire les revenus passifs, comme celle fondée sur la philosophie de l’achat/rétention, des placements dans des titres versant des dividendes peu élevés, des investissements dans des fonds négociés en bourse (FNB) et des fonds communs de placement qui ne procèdent pas à des distributions annuelles, ou des investissements dans des titres remboursant du capital.
  • des façons de réduire le niveau de liquidités dans votre société en investissant dans des véhicules de placement alternatifs comme la souscription de polices d’assurance-vie détenues par la société (si vous aviez un besoin d’assurance), la mise sur pied d’un RRI ou d’une convention de retraite.

Planifier pour le futur

Dans le cadre d’une planification proactive pour le futur, il est important de bien comprendre les tenants et aboutissants ainsi que l’impact potentiel d’une mise en œuvre de ces stratégies visant à minimiser les impôts de votre société et préserver sa valeur nette. Discutez avec un conseiller fiscal qualifié afin de déterminer si une ou plusieurs des stratégies de planification fiscale décrites dans cet article pourraient convenir à votre société. En plus de ces considérations fiscales, vous devriez revoir la planification financière de votre société afin de vous assurer qu’elle reflète bien vos objectifs en matière de placements et vos objectifs d’affaires.

Cet article pourrait décrire des stratégies, mais elles ne sont pas forcément toutes adaptées à votre situation financière particulière. Les renseignements contenus dans cet article n’ont pas pour but de donner des conseils fiscaux, juridiques ou en assurance. Afin de vous assurer que votre situation particulière sera bien prise en compte et que toute initiative sera fondée sur les renseignements les plus récents qui soient, vous devriez obtenir des conseils professionnels d’un conseiller qualifié fiscal, juridique et/ou en assurance avant d’agir sur la foi des renseignements fournis dans cet article.