La route entre Montréal et Tampa est longue, particulièrement avec deux enfants assis dans les sièges arrières. Par contre, elle m’a permis de réfléchir sur les présentes conditions des marchés.
En janvier, les Banques Centrales ont finalement décidé qu’il était temps de s’attaquer à l’inflation. Bien que les taux de la Banque Centrale du Canada ont passé de 0.25% à 1%, ce changement représente une hausse de 400% du taux directeur. Pourquoi cela est-il un problème, puisque l’économie tourne à plein régime et que la Banque Centrale cherche depuis des années à augmenter l’inflation?
Imaginez-vous dans un véhicule en direction de la Floride sur une autoroute américaine et que derrière vous roule le Shérif local. Si d’un coup les panneaux de vitesse changent de 130 km/h à 30 km/h, il serait fort à parier que vous deveniez rapidement très intime avec votre pare-brise!
Ce coup de frein est précisément ce que cherche les Banques Centrales. Après avoir passé 15 ans à essayer de stimuler l’inflation qu’elles jugeaient trop faible, elles se retrouvent aujourd’hui avec le problème inverse! Il faut donc savoir faire attention à se que l’on souhaite.
Les marchés.
Ainsi, on assiste au retour d’une dynamique qui semblait avoir disparue depuis 2008, soit la compétition entre les actifs financiers. Voici un résumé des discussions que vous avez tous entendues dans les dernières années et qui illustre ce mécanisme :
« Investisseur : j’aimerais placer mon argent avec le moindre risque. Combien peux-tu m’obtenir ?
-Elie : Bien, les obligations du gouvernement du Canada d’un an rapporte 0.5%.
-I : ouf, et si on prenait du risque dans les obligations ?
-E : Dans ce cas, les obligations de basses qualités sont dans les 2,5%, mais il y a un risque de perte de capital que le 2,5% ne couvrirait pas.
-I : Je ne prendrais pas ma retraite avec 2,5% ! Que font les actions des grandes sociétés ?
-E : Celles-ci sont plus risquées que les obligations avec un risque d’attaquer le capital. Historiquement, elles font en moyenne entre 5 et 6%.
-I : Les actions américaines ont énormément de potentiel non? J’ai entendu mon ami dire qu’elles ont fait plus de 20% récemment.
-E : Oui, mais elles peuvent également plonger énormément, le risque de perte de capital est supérieur et le risque de change est important. Ce n’est pas à prendre à la légère. Vos attentes devraient être autour de 7-9% à long terme. »
Vous me direz immédiatement que personne ne doit être économiste pour comprendre cette relation. Simplement, c’est un résumé de la relation risque/rendement.
Toutefois, cette relation agit dans les deux sens. Imaginons un instant que le gouvernement hausse les taux d’intérêt sans risque à 15%, vous voudriez faire au moins 17% sur les obligations, 20% sur les actions canadiennes et 25% sur les américaines.
Le rendement ne change pas
Les compagnies non financières ne génèrent pas plus d’argent si les taux d’intérêt montent. Pensez à Apple se vendant aujourd’hui à 2,5 trillions, elle génère à ses actionnaires un rendement de 4,67%, contre 1,5% pour les obligations du trésor. Comme les revenus d’Apple sont fixes, qu’arriverait-il si les taux du trésor atteignaient 5%. Il serait fort à parier que le prix de l’action d’Apple s’écraserait comme une crêpe.
Warren Buffett a déjà écrit que “les taux d’intérêt sur les marchés financiers sont équivalent à la gravité sur terre”. Après un court trajet à zéro gravité, les marchés sont de retour sur terre.
Où est la sortie?
Lorsque les taux montent, les investisseurs sont rapidement alertés par le changement de dynamique. Une fois la fumée dans l’air, ils ne peuvent pas tous sortir du théâtre en même temps. Leur effort collectif pour « rebalancer » leur portefeuille en liquide aggrave la baisse des marchés. C’est généralement à ce moment que ces investisseurs reçoivent leur premier cours sur la dynamique des marchés.
En effectuant ces changements, les investisseurs choisissent un mauvais placement qui ne génère rien et qui est directement attaqué par l’inflation. Il ignore également le conseil de Wayne Gretzky « Patinez où la rondelle sera et non où elle est présentement ».
Et maintenant?
Évidemment, je payerais très cher pour une copie du Wall Street Journal de mai 2023. Toutefois, n’ayant pas encore de De Lorean, nous devons nous rabattre vers la deuxième meilleure solution. Une combinaison d’excellentes entreprises avec peu de dette et de la patience.
D’un côté, les bonnes entreprises ont la capacité de hausser leur prix de manière équivalente ou supérieure à l’inflation. Le fait qu’elles n’aillent pas ou peu de dettes les isolent de la hausse du coût de financement.
De l’autre, la patience nous permet de garder une tête froide. Personne ne sait jusqu’à quand cette situation va perdurer, mais ce qui est certain est que nos entreprises passeront au travers et que les opportunités sont à l’horizon.
Si l’on attend les rouges-gorges, nous raterons le printemps. Et bien que je n’aie aucune idée de la direction des marchés à court terme, je suis certain qu’à long terme le marché des actions restera le meilleur choix pour les investisseurs.