Conjoncture des marchés
Depuis le début de 2025, les marchés financiers ont été particulièrement volatils. Après une chute marquée et une vague de panique jusqu’au 7 avril, ils ont rebondi vigoureusement et affichent désormais des rendements positifs pour l’année. Plusieurs facteurs expliquent ce renversement. D’abord, environ 75 % de l’économie nord-américaine repose sur les services, moins exposés aux barrières commerciales. Ensuite, l’effet concret des nouveaux tarifs américains demeure limité : leur application a été repoussée à plusieurs reprises, de nombreuses exceptions ont été accordées, et seulement 22 % de leur coût a été refilé aux consommateurs, le reste ayant été absorbé par les entreprises et les producteurs étrangers.
Comme en 2020-2021, un afflux de nouveaux spéculateurs a propulsé certains secteurs au-delà des fondamentaux. Au Canada, près de la moitié de la hausse de la bourse provient des sociétés aurifères, qui représentent maintenant environ 12 % de l’indice. Aux États-Unis, la quasi-totalité de la progression depuis avril vient des grandes sociétés liées à l’intelligence artificielle, dont certaines ne génèrent pas de profits. Les sept plus importantes compagnies technologiques se négocient aujourd’hui à 32 fois leurs bénéfices, contre 24 fois en début d’année. De plus, les 50 plus grandes sociétés américaines représentent désormais 75 % de la capitalisation du S&P 500, soit le double d’il y a dix ans. Cette concentration extrême illustre un marché porté par un petit nombre de titres vedettes. On remarque aussi que les investisseurs institutionnels privilégient l’or et les liquidités, tandis que les particuliers se tournent massivement vers les actions liées à l’IA.
Notre performance
Dans ce contexte, nos portefeuilles affichent une performance très proche de nos indices de référence, ce qui nous satisfait pleinement. De janvier à début avril, alors que les marchés reculaient fortement, nous avons mieux résisté grâce à une diversification prudente. D’avril à juillet, nous avons moins profité de la hausse spéculative alimentée par quelques titres technologiques, mais notre style de gestion est demeuré le même : investir dans de bonnes compagnies et maintenir une diversification solide, plutôt que de courir après les tendances.
Nous avons légèrement accru notre exposition à l’or au cours des derniers mois, mais uniquement à travers des sociétés solides, rentables et opérant dans des juridictions fiables. Les dernières semaines ont confirmé que notre positionnement sélectif est payant. Plusieurs de nos compagnies ont annoncé de bons résultats, alors que plusieurs titres technologiques vedettes ont subi des reculs. Résultat : en août, nos portefeuilles ont progressé nettement plus que nos indices de référence, profitant d’un retour de l’intérêt vers la qualité.
Perspectives
Nous croyons qu’il serait prudent de demeurer vigilants dans les prochains mois. Plusieurs signaux économiques préoccupants nous incitent à la vigilance.
Au Canada, la croissance du PIB est maintenant négative.Les exportations souffrent du climat de guerre commerciale et le marché immobilier ralentit. Le consommateur résiste encore grâce à l’épargne accumulée ces dernières années et aux dépenses publiques alimentées par de larges déficits, mais ce coussin s’amincit. Le taux d’épargne des ménages est retombé sous 6 %, proche des niveaux d’avant la pandémie, et le chômage est remonté à près de 7 %, son plus haut niveau depuis près d’une décennie. La situation pourrait donc se détériorer si la conjoncture continue de se dégrader.
Aux États-Unis, le portrait est différent : la croissance globale demeure forte, mais les dépenses des ménages montrent des signes d’essoufflement. En termes réels, elles n’ont progressé que d’environ 0,4 % au premier semestre, leur plus faible rythme depuis la pandémie. Les taux d’intérêt élevés, les compressions budgétaires et les premiers effets des tarifs commencent à se faire sentir. Les retards de paiement sur les cartes de crédit ont franchi 12 %, un niveau inédit depuis 2008, et les défauts hypothécaires augmentent graduellement. L’intelligence artificielle soutient encore l’économie : selon certaines estimations, l’investissement en IA ajoutera environ 1,2 % de croissance au PIB cette année, une contribution rarement vue pour une seule industrie en si peu de temps. À titre comparatif, la bulle technologique de la fin des années 1990 n’avait ajouté qu’1 % maximum pendant une année.
Le président américain insiste pour une baisse des taux d’intérêt, et le marché anticipe près de cinq réductions d’ici 18 mois. Cependant, l’inflation reste proche de 3 %, malgré la baisse marquée de l’énergie depuis un an. Certaines études projettent que les tarifs finiront par être refilés majoritairement aux consommateurs, ce qui pourrait renforcer leur impact d’ici la fin de l’année.
Une baisse rapide des taux demeure peu probable, sauf en cas de ralentissement marqué de l’économie.
Sur le plan boursier, les valorisations demeurent élevées. Le marché américain se négocie autour de 24 fois les bénéfices, bien au-dessus de sa moyenne historique. Nous faisons face à un marché qui monte grâce à un petit nombre de secteurs, alors que les signaux économiques sont fragiles.
Stratégie d’investissement
Dans ce contexte, nous comptons renforcer notre approche prudente et sélective, tout en saisissant certaines occasions.
Au Canada, nous allons miser sur des entreprises solides, peu volatiles, qui génèrent des profits stables. Il s’agit surtout des oligopoles présents dans plusieurs industries et des sociétés de ressources naturelles, devenues plus efficaces et disciplinées. Ces compagnies sont en grande partie sous-évaluées à cause des craintes liées aux tarifs, mais elles disposent de bilans solides, de flux de trésorerie importants et de dividendes soutenables. Elles sont bien placées pour traverser un ralentissement.
À l’extérieur du Canada, nous voulons nous exposer davantage à trois grands thèmes à long terme : l’intelligence artificielle, la robotisation et les véhicules autonomes. Mais plutôt que de détenir les titres les plus chers et connus, nous ciblons des sociétés moins médiatisées mais essentielles : fabricants d’équipements et de composants pour l’infrastructure numérique, fournisseurs de logiciels spécialisés et producteurs de matières premières critiques comme le cuivre et le gaz naturel. Nous visons aussi certaines grandes entreprises dans des secteurs traditionnels mais qui profiteront indirectement de ces grandes tendances.
Nous augmentons graduellement notre exposition internationale par rapport aux États-Unis. Nous croyons que le dollar américain poursuivra sa baisse et que le marché américain est trop dispendieux comparativement au reste du monde. La politique tarifaire américaine vise particulièrement la Chine, mais ce pays compte désormais près de dix fois plus de robots industriels que les États-Unis et investit presque autant en recherche et développement. Il a pris une avance considérable dans les véhicules électriques et veut répéter ce succès dans d’autres secteurs stratégiques. L’Inde, aussi sous pression américaine, exporte surtout des services, en grande partie épargnés par les barrières tarifaires. Nous privilégions donc certaines firmes internationales bien positionnées sur ces grandes tendances, tout en demeurant abordables, y compris certaines sociétés technologiques chinoises.
Notre stratégie vise à protéger vos portefeuilles, tout en maintenant une participation aux moteurs de croissance de long terme. Les compagnies que nous détenons profitent de ces tendances structurelles, tout en étant moins chères et moins risquées que les titres les plus populaires du moment. Nous croyons que cela optimisera vos rendements par rapport à la volatilité et au risque.