Le meilleur moment et le pire moment
En 2020, les nouvelles pour les investisseurs en titres à revenu fixe ont été tantôt bonnes, tantôt mauvaises. Ce qui est réjouissant, c’est que la plupart des portefeuilles de titres à revenu fixe ont inscrit des rendements totaux largement supérieurs à leurs rendements en revenu de départ du début de l’année, étant donné que la chute des taux a fait grimper les prix des obligations. Par contre, les rendements en revenu de départ pour l’année 2021 sont beaucoup moins élevés et le contexte de réinvestissement est plus difficile.
Heureusement, on peut utiliser de nombreux instruments à revenu fixe pour atteindre ses objectifs financiers. Compte tenu de la faiblesse actuelle des taux d’intérêt, nous pensons qu’il est raisonnable de distinguer les différents titres en portefeuille selon leur rôle : procurer une certaine sécurité ou produire un revenu. Les obligations de grande qualité et les titres apparentés à des liquidités sont des sources de sécurité et peuvent générer des fonds en période de volatilité sur le marché. Afin de préserver le revenu global ainsi que le pouvoir d’achat, ces placements à faible rendement peuvent être contrebalancés par des titres subordonnés et de qualité inférieure qui sont assortis d’un taux plus élevé.
Tendance baissière
En 2020, les taux obligataires ont poursuivi leur baisse tendancielle amorcée il y a 40 ans. Les taux des obligations d’État à court terme ont fléchi, car les banques centrales ont abaissé leurs taux directeurs en raison de la pandémie de COVID-19, tandis que les taux des obligations d’État à long terme ont chuté à cause de la révision à la baisse des prévisions de croissance économique. Alors qu’avait lieu une reprise de l’économie et des marchés financiers, les achats d’obligations d’État par les banques centrales ont maintenu les taux des titres gouvernementaux à long terme près de leurs creux du mois de mars. Pour leur part, les taux des obligations de sociétés, qui avaient fortement augmenté en mars, ont fait marche arrière et ont diminué de façon soutenue tout au long de l’année, car les investisseurs se sont tournés vers cette catégorie d’actif afin d’accroître leurs rendements.
Grâce à ces conditions de marché plus favorables, les sociétés ont eu l’occasion de proroger l’échéance de leurs titres de créance. Cette situation a été observée à l’échelle mondiale, comme en témoigne le recul du rendement en revenu de l’indice global des obligations mondiales Bloomberg Barclays lors des deux dernières années. À la fin d’octobre 2018, le rendement en revenu de l’indice était d’environ 2,25 %. À la fin d’octobre 2020, il était inférieur à 1 %.
La production de revenu est plus difficile
Le graphique suivant, qui montre le profil de revenu combiné d’un portefeuille composé à parts égales d’actions et d’obligations américaines, illustre le défi auquel seront confrontés les investisseurs axés sur le revenu en 2021. Ce revenu combiné a diminué au fil du temps, principalement à cause des titres à revenu fixe, car les taux obligataires, soit ceux des obligations d’État américaines à dix ans, sont passés de plus de 10 % à moins de 1 %. Le recul annuel moyen des taux, qui a été d’environ 25 points de base (pb), a favorisé la réalisation de gains en capital pour les porteurs d’obligations, mais les gains passés ne contribuent pas à la production de rendements futurs. Les objectifs des investisseurs n’ont pratiquement pas changé non plus au fil des ans. Il en résulte un contexte de placement qui, selon nous, requiert une approche plus nuancée.
La diminution des taux a réduit le profil de revenu des portefeuilles équilibrés
Profil de revenu d’un portefeuille hypothétique composé à 50 % d’actions américaines et à 50 % d’obligations du Trésor à 10 ans
Source : Bloomberg. Le rendement en revenu des actions américaines correspond au rendement en dividendes de l’indice S&P 500. Données prises en compte jusqu’au 2 novembre 2020
Pas de réponse unique : diviser les titres qui procurent de la sécurité et ceux qui produisent un revenu
Nous sommes d’avis que les investisseurs qui élaborent un portefeuille de titres à revenu fixe dans ce contexte exceptionnellement difficile devraient diviser leurs placements selon leur rôle : la préservation du capital ou la production de revenu. Dans le cadre de cette approche, le portefeuille est composé d’une variété de titres, soit ceux qui apportent une source de fonds en période de volatilité sur le marché, et les placements à taux supérieur qui représentent une source de flux de trésorerie, contribuant à ce que les rendements suivent le rythme de l’inflation. Tous les investisseurs peuvent recourir à cette approche, qui peut mettre en jeu des obligations, des fonds communs de placement et des fonds négociés en bourse, ou une combinaison des trois.
Sécurité
Essentielle pour les investisseurs qui doivent accéder à leurs fonds
Les obligations de grande qualité et les titres apparentés à des liquidités peuvent être des sources de sécurité et générer des fonds en période de volatilité sur le marché. Ils revêtent une importance cruciale pour les investisseurs qui devront engager des dépenses à des moments précis, car ils permettent de répondre à ces besoins sans réduire le capital de façon permanente, comme cela pourrait être le cas si les investisseurs étaient contraints de liquider des actifs dont les prix sont susceptibles de fluctuer davantage en période de volatilité financière.
Tranquillité d’esprit et souplesse
Même pour les investisseurs qui ne prévoient pas de dépenses précises, les placements à faible volatilité procurent un avantage considérable en matière de gestion de portefeuille, qui va au-delà de l’uniformisation des rendements. Il s’agit de la capacité d’utiliser les titres de grande qualité comme source de fonds après les périodes de volatilité sur le marché financier. Cet atout procure aux investisseurs la souplesse nécessaire pour saisir les occasions de se tourner vers des titres dont les cours ont fortement diminué.
Un excellent exemple d’une telle occasion s’est présenté en mars 2020. À ce moment, les rendements des obligations d’État étaient supérieurs d’au moins 25 % à ceux des titres à rendement élevé. Il y a deux ans, dans nos Perspectives mondiales 2019, nous avons déconseillé la recherche de rendements du côté des obligations de qualité inférieure, car leurs évaluations étaient telles que même un rajustement modeste des prix aurait pu effacer le rendement supplémentaire que procuraient ces titres. L’évolution des prix en février et en mars 2020 illustre ce à quoi peut ressembler une telle période. Dans la foulée du rajustement des prix, le rendement en revenu de l’indice d’obligations à rendement élevé de sociétés américaines Bloomberg Barclays a été pendant deux mois supérieur à 8 %, ce qui représente un écart d’au moins 700 pb par rapport aux taux des obligations d’État, inférieurs à 1 %.
Les obligations d’État ont largement surpassé les obligations de sociétés à rendement élevé au premier trimestre, marqué par les tensions sur le marché
Source : Bloomberg. Rendements totaux indiqués : rendement des titres du Trésor américain selon l’indice des effets du Trésor américain Bloomberg Barclays ; rendement des obligations de sociétés à rendement élevé selon l’indice d’obligations à rendement élevé de sociétés américaines Bloomberg Barclays. Données prises en compte jusqu’au 30 octobre 2020
Revenu
Un rôle essentiel pour répondre aux besoins en revenu et préserver le pouvoir d’achat
Les placements « sûrs » peuvent être contrebalancés par les titres à rendement élevé dans le but d’accroître le revenu de placement et ainsi conserver le pouvoir d’achat du capital total investi. Puisque les taux des obligations d’État de la plupart des pays avancés se situent près de zéro, nous croyons que les titres plus risqués – assortis de taux allant de 5 % à 10 % et caractérisés par des cotes de crédit moins élevées et une position subordonnée dans la structure du capital – peuvent aider les investisseurs à obtenir des rendements suivant le rythme de l’inflation.
Le rendement supplémentaire offert par les obligations de sociétés par rapport aux obligations d’État (soit la rémunération pour le risque de crédit) reste proche des moyennes historiques, même si les taux des obligations d’État se situent à des creux records. La rémunération pour le risque de crédit constitue la part du lion du taux de nombreuses obligations. Ainsi, elle représentait seulement 25 % du rendement en revenu total de l’indice des obligations de sociétés américaines Bloomberg Barclays lorsque celui-ci produisait un rendement en revenu de plus de 4 % en 2018. Ce même indice rapportait un rendement en revenu de 2 % à la fin d’octobre 2020, mais la rémunération pour le risque de crédit générait près des deux tiers de ce rendement. Même si elle est loin d’être parfaite, cette méthode d’évaluation permet de se pencher sur l’une des raisons pour lesquelles les investisseurs ont récemment manifesté un solide appétit pour les obligations de sociétés à rendement élevé.
La rémunération pour le risque de crédit représente une large part du rendement en revenu total
Source : Bloomberg. La rémunération du risque de crédit est mesurée en comparant l’écart corrigé en fonction des clauses optionnelles et le rendement en revenu total ; l’écart corrigé en fonction des clauses optionnelles et le pire rendement en revenu de l’indice des obligations de sociétés américaines Bloomberg Barclays sont pris en compte dans le calcul. Données prises en compte jusqu’au 4 novembre 2020
Méfiez-vous du « coût caché » des titres à rendement élevé
La volatilité des prix compte parmi les inconvénients des titres à rendement élevé. Ce « coût » peut être caché pendant de longues périodes, mais quand des liquidations se produisent sur le marché, les titres à revenu fixe à rendement élevé sont habituellement corrélés avec les actions. Pour faire face à cette éventualité, qu’il faut garder à l’esprit, les investisseurs peuvent combiner des titres à rendement élevé et des titres sûrs pour éviter que leur portefeuille soit trop concentré.
Il est également possible de faire l’acquisition d’une variété d’actifs productifs de revenus pour répartir le risque entre différentes structures de produit et différents secteurs. Voici un exemple simple : des investisseurs cherchant à prendre des risques liés au crédit pour bonifier leurs rendements pourraient effectuer 100 % de leurs placements à revenu fixe dans des obligations de sociétés de catégorie investissement assorties d’un taux de 2 %, ou obtenir le même rendement en effectuant le quart de leurs placements à revenu fixe dans des obligations à rendement élevé et le reste en obligations d’État. Il existe différentes façons d’obtenir le résultat escompté.
Théorie et pratique
Si le classement des titres à revenu fixe est fonction de leur niveau de risque – obligations d’État, obligations de sociétés de catégorie investissement, obligations de sociétés de qualité inférieure –, il serait faux de croire qu’il existe une ligne de démarcation claire entre chaque catégorie du point de vue du risque. Cette distinction peut être évidente dans les extrêmes (par exemple, des obligations d’État à court terme d’un côté et de l’autre, les obligations à long terme émises par une société de qualité inférieure très endettée), mais nous croyons que la plus grande partie des décisions portent sur des placements situés entre ces deux extrêmes.
On peut étendre le concept du spectre du risque à un portefeuille contenant des actions. De nombreux investisseurs préfèrent un portefeuille axé sur les actions pour la production de revenu, mais plus le portefeuille table sur les actions pour obtenir un revenu et une croissance, plus il devient important d’obtenir une sécurité suffisante dans la composante des titres à revenu fixe.
Il est nécessaire d’établir un équilibre
La tâche consistant à concilier la sécurité et la liquidité avec la production de revenu requiert une attention accrue dans le présent contexte. Les investisseurs qui privilégient exagérément la liquidité sont susceptibles d’obtenir des rendements inférieurs en raison de la faiblesse actuelle des taux d’intérêt. En revanche, ceux qui accordent la priorité au revenu au détriment de la liquidité risquent davantage de voir grimper la volatilité des cours des titres en portefeuille. Lorsqu’une importance exagérée est accordée à l’un ou l’autre objectif, ce qui se traduit par un revenu insuffisant ou une volatilité plus élevée qu’on le voudrait, les investisseurs peuvent rater leurs objectifs à long terme. Il est particulièrement important d’établir le juste équilibre au sein d’un portefeuille dans le contexte actuel, alors qu’il est difficile d’atteindre le double objectif de la sécurité et du revenu en misant sur un seul type de placement.
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