Il reste cependant confronté à des obstacles à moyen terme, soit les coûts en capital élevés et les défis liés à la construction. Nous vous présentons quelques occasions de placement dans ce secteur.
Un vent de changement souffle sur le secteur de l’énergie nucléaire. Après des décennies de sous-investissement, c’est-à-dire depuis les années 1980, l’énergie nucléaire retient de plus en plus l’attention des investisseurs et du public. Des fonds de placement axés sur le développement durable commencent à y affecter des capitaux. Après avoir été influencée par des accidents comme ceux de Chernobyl et de Fukushima, la perception du public s’améliore graduellement, à mesure que le secteur s’attaque aux problèmes de sécurité et met l’accent sur le développement durable.
Le secteur des centrales nucléaires (qui produisent de la chaleur et de l’électricité au moyen de la fission nucléaire) est bien placé pour croître, car il bénéficie de la demande d’énergie propre. Quelque 60 nouveaux réacteurs sont en cours de construction dans le monde, et la construction de 100 réacteurs supplémentaires est prévue. Compte tenu du défi que représente la transition énergétique et de la montée des tensions géopolitiques, le nucléaire se démarque comme source d’énergie de base fiable et sobre en carbone. La technologie a fait des progrès qui ont permis d’améliorer considérablement la sécurité et de diminuer le plus possible les déchets. Tout cela ouvre la voie à un changement positif et à une possible renaissance du secteur.
Centrales nucléaires en cours de construction ou dont la construction est prévue, en date de septembre 2023 – plus de la moitié sont en Chine ou en Russie
La décarbonation, une étape nécessaire
Tout comme l’énergie solaire, éolienne, géothermique ou hydroélectrique, l’énergie nucléaire produit peu d’émissions directes de carbone. Puisqu’il est urgent d’atteindre les cibles de carboneutralité mondiales, les décideurs se tournent vers le nucléaire en complément des sources renouvelables et des centrales au gaz naturel à faibles émissions. D’après l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la production d’énergie nucléaire devra doubler d’ici 2050 si l’on veut réaliser les objectifs de carboneutralité1 . Pour y arriver à temps et de manière économique, il se peut qu’on ne puisse pas compter uniquement sur les sources d’énergie renouvelables, malgré la forte croissance attendue au cours des prochaines décennies.
Si l’on tient compte des émissions du cycle de vie, c’est-à-dire les émissions indirectes associées à la construction des centrales et à l’élimination des déchets, le nucléaire est assez comparable aux autres sources d’énergie. En effet, le nucléaire exige moins de matériaux de construction, a une durée de vie utile supérieure (40 à 100 ans, alors que les panneaux solaires et les parcs éoliens doivent être remplacés tous les 20 à 30 ans) et occupe moins d’espace (les centrales solaires et les parcs éoliens ont besoin de 75 et de 360 fois plus d’espace, respectivement, pour produire la même quantité d’électricité)2 . Sans le nucléaire, il sera plus difficile et plus coûteux d’atteindre les objectifs de carboneutralité. En effet, l’AIE fait remarquer que, sans le nucléaire, il faudra investir 500 milliards de dollars supplémentaires et que les factures d’électricité des consommateurs augmenteront de 20 milliards de dollars par année d’ici 20503 . De toute évidence, pour atteindre nos objectifs climatiques, il faudra avoir recours à un mélange équilibré de sources d’énergie à faibles émissions, dont le nucléaire.
Le nucléaire parmi les sources d’énergie qui produisent le moins d’émissions
Une solution à faible coût
La fiabilité du nucléaire pour la production d’électricité de base en fait une source d’énergie utile. Les centrales nucléaires produisent de l’électricité 93 % du temps, tandis que les sources d’énergie renouvelables intermittentes, comme l’éolien et le solaire, en génèrent 35 % et 25 % du temps, respectivement4. Les sources renouvelables exigent non seulement de la capacité supplémentaire, mais elles ont aussi besoin d’une source de rechange ou de batteries pour stocker l’énergie, ce qui fait augmenter les coûts et les émissions qui leur sont associés. Bien que les études du secteur indiquent que le nucléaire est concurrentiel lorsqu’on tient compte des coûts de l’ensemble du système, la réalité est souvent différente. Les dépassements de coûts et les retards de construction sont fréquents, si bien que l’électricité produite finit par coûter nettement plus cher que les estimations de départ. Cependant, certains avancent que les projets nucléaires ont de meilleures chances de succès devant eux. Les techniques de construction modulaire employees pour les nouvelles centrales ont le potentiel de réduire la complexité et les risques, tandis que le savoir technologique et l’expérience permettront de réaliser des gains d’efficience. En outre, les gouvernements peuvent contribuer à faire baisser les coûts par des engagements à long terme, du financement et une réglementation claire entourant les processus de délivrance de permis et de construction.
L’une des façons les plus simples et abordables d’accroître la capacité nucléaire est de prolonger la durée de vie des centrales existantes. Selon l’AIE, il est possible d’ajouter de 20 à 40 ans aux réacteurs qui avaient été conçus pour durer 40 ans. Les pays concernés ont ainsi l’occasion de conserver les avantages économiques de la production d’énergie de base sans carbone, à un faible coût marginal. Les coûts et les risques de construction sont également moindres5 . En outre, lorsque la durée de vie des centrales est prolongée, l’énergie nucléaire devient concurrentielle par rapport aux énergies solaire et éolienne dans de nombreuses régions.
Initiatives gouvernementales et réglementaires
Dans le sillage de la guerre entre la Russie et l’Ukraine et de la flambée des prix de l’énergie qui a suivi, les politiques nucléaires ont changé pour assurer la sécurité et l’indépendance énergétiques. Les gouvernements réévaluent l’importance de diversifier les sources d’énergie et les fournisseurs et d’avoir un portefeuille qui peut offrir de la flexibilité à court terme et une capacité adéquate lors des périodes de forte demande5 .
Les initiatives récentes prises par les gouvernements du monde entier témoignent de leur volonté de réduire les risques liés aux projets nucléaires et de l’importance stratégique de cette technologie pour la carboneutralité5 . Par exemple, aux États-Unis, la loi sur la réduction de l’inflation prévoit un crédit d’impôt pour l’énergie nucléaire, tandis que la loi CHIPS soutient le développement de réacteurs de pointe6 . Dernièrement, le Canada s’est engagé à tripler sa capacité de production d’énergie nucléaire d’ici 20507 .
Les décisions relatives à l’énergie nucléaire ne touchent pas uniquement l’économie. Elles tiennent compte d’autres aspects, comme la stratégie sur les ressources nationales, la non-prolifération des armes et les relations géopolitiques. La collaboration entre les pays occidentaux sur le nucléaire a favorisé les transferts de technologie et l’intégration économique, lesquels peuvent contribuer à une meilleure harmonisation des politiques. La Russie et la Chine ont été plus actives pour ce qui est d’exporter leurs technologies nucléaires ; leur domination dans le secteur a également favorisé l’intégration et la coopération politique5 .
Adhésion du public et des investisseurs
La perception des gens a été ternie par les accidents survenus dans des centrales comme celles de Three Mile Island (États-Unis, 1979), de Chernobyl (Ukraine, 1986) et de Fukushima (Japon, 2011), de même que par l’utilisation du nucléaire pour créer des armes. Elle serait cependant en train de s’améliorer, autant chez le public que chez les politiciens.
RBC Marchés des Capitaux croit que le secteur et les gouvernements ont fait du bon travail pour informer (et peut-être convaincre) le public des avantages du nucléaire. Un public bien informé doit tout de même être sûr que les avantages l’emportent sur les risques et que l’accent est mis sur la sécurité opérationnelle, la gestion du combustible épuisé et la prévention de la prolifération des armes. L’opinion publique devrait continuer d’évoluer positivement tandis que le secteur renforce son bilan en matière de sécurité, de fiabilité et de durabilité sur le plan de l’environnement5.
En fait, les accidents majeurs sont rares et le nucléaire est relativement sécuritaire par rapport à de nombreuses technologies de production d’électricité. Une personne qui habite à côté d’une centrale nucléaire pendant un an est exposée à moins de radiations qu’en passant une radiographie chez le dentiste. Qui plus est, tous les déchets de combustible épuisé produits par les États-Unis dans les 60 dernières années pourraient remplir un seul terrain de football, à une profondeur de dix mètres. Il y a aussi des façons de les recycler5 . L’intérêt envers le nucléaire devrait continuer à croître à mesure que les faits sont mieux compris du public.
Encore des obstacles à surmonter
L’un des plus gros freins au développement nucléaire est le défi que représente la construction. Bon nombre de projets dans le monde dépassent les budgets et subissent des retards. Ces embûches font augmenter le coût global de l’énergie nucléaire, ce qui nuit à son adoption et à la perception des investisseurs. Les projets peuvent prendre près d’une décennie à mener à bien, accroissant ainsi la complexité et le risque associés. Les projets éoliens et solaires ont de bien meilleurs antécédents ; ils sont donc moins risqués pour les investisseurs.
Cela dit, il y a des raisons de croire que le problème des coûts peut être surmonté. On peut opter pour de petits réacteurs modulaires afin de faciliter le transport et de réduire les coûts initiaux. Il est également possible d’en concevoir de plus grands pour simplifier les choses et d’avoir recours à l’automatisation. En Chine, certains projets ont pu être réalisés en à peine cinq ans, repoussant ainsi les limites de la construction5 . La prolongation de la durée de vie des centrales, comme il a déjà été mentionné, est une autre façon de réduire les coûts. Ces facteurs devraient aider plus de projets à aller de l’avant.
La réglementation a elle aussi un effet dissuasif. Vu les risques de sécurité liés à l’énergie nucléaire, il est logique que la réglementation soit stricte. Cependant, les règles évoluent constamment. Elles peuvent même changer pendant les processus de délivrance des permis et de construction, qui prennent du temps. Il incombera aux gouvernements de mettre en place un cadre robuste et stable, tout en donnant la priorité à la sécurité5 .
Aussi attrayant que le nucléaire nous paraisse aujourd’hui, de nombreuses entreprises du secteur énergétique se sentent menacées par toute croissance de l’énergie nucléaire. Surtout si leur « part du gâteau » de la transition diminue. Soucis d’abordabilité, rareté des capitaux et coût en capital croissant pourraient inciter les investisseurs et les gouvernements à choisir la voie de la moindre résistance (éolien, solaire, gaz) et à renoncer aux avantages à plus long terme du nucléaire5 .
En tant qu’investisseurs, nous devons analyser autant les avantages que les inconvénients pour évaluer la viabilité du nucléaire.
Occasions de placement
En Amérique du Nord, le principal moyen d’investir dans l’énergie nucléaire est de passer par les secteurs des services publics, des produits industriels et des matières.
Les services publics et les producteurs d’énergie indépendants ont l’appétit nécessaire pour investir dans des centrales nucléaires – avant que leur construction commence et jusqu’à ce qu’elles soient opérationnelles –, tant que le profil de risque du projet est suffisamment attrayant. Cela comprend les coûts de construction, la certitude des revenus, l’approvisionnement en combustible, la politique gouvernementale et le cadre réglementaire, ainsi que le déclassement et la gestion des déchets.
Partout dans la chaîne de valeur, des sociétés industrielles participent en fournissant le service et le soutien nécessaires aux centrales électriques existantes. Cela dit, le sous-investissement des dernières décennies fait en sorte qu’il est plus difficile d’attirer de nouveaux talents dans le secteur. Il faut s’attendre à ce qu’une meilleure gestion de projet, du recrutement supplémentaire et la formation de main-d’œuvre spécialisée occupent une place importante à l’avenir.
L’extraction minière de l’uranium et le traitement nécessaire pour le transformer en combustible pour les réacteurs (conversion, enrichissement et fabrication) joueront un rôle crucial dans la croissance future du secteur nucléaire. RBC Marchés des Capitaux prévoit un déficit modéré pour le marché de l’uranium dans les années 2020, puis un déficit potentiellement important d’ici les années 2030. La croissance du marché sera stimulée par la recherche d’indépendance vis-à-vis de la Russie et par le renforcement de la capacité d’enrichissement en Occident. Les ressources en uranium ne sont pas rares ; elles sont simplement inexploitées. Attendez-vous à ce que les clients des services publics aident à en financer la production au moyen de contrats à long terme.
Communiquez avec votre conseiller RBC pour en savoir plus sur les occasions de placement dans votre région.
- Agence internationale de l’énergie (AIE), Nuclear Power, juillet 2023. Rapport.
- BofA Global Research. The RIC Report – The nuclear necessity, mai 2023.
- Agence internationale de l’énergie (AIE), Nuclear Power, juillet 2023. Rapport.
- BofA Global Research. The RIC Report – The nuclear necessity, mai 2023.
- Recherche sur actions de RBC. « Climate of change for nuclear energy », RBC Imagine, novembre 2023.
- https://www.rbcinsight.com/wm/Share/ResearchViewer/?SSS_C3D663894D10AA5677300C2DFAEBDE0E
- https://ressources-naturelles.canada.ca/energie/ressources/cooperation-international-en-matiere-denergie/cop28- declaration-qui-vise-tripler-la-capacite-de-production-denergie-nucleaire-2023/25592
Les procédés de contrôle diligent ne sont pas une garantie de bénéfice ni une protection contre la perte. Comme tous types de placements, l’investissement en fonction des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) et l’investissement responsable comportent des risques, y compris celui de perdre le capital investi. Les rendements antérieurs ne sont pas garants des résultats futurs. Le présent document ne tient pas compte de la situation financière individuelle, des objectifs d’investissement, des critères ESG, ni des autres préférences personnelles des destinataires. Il est impossible d’investir directement dans un indice. Nulle disposition dans le présent document ne constitue un conseil juridique, comptable ou fiscal ni un conseil en placement adapté individuellement. Veuillez discuter des répercussions fiscales ou juridiques de vos placements avec votre conseiller fiscal ou juridique indépendant.
Ces renseignements ne constituent pas des conseils de placement et doivent être utilisés uniquement dans le cadre d’une discussion avec votre conseiller en placement de RBC Dominion valeurs mobilières inc. Ainsi, votre situation sera prise en considération comme il se doit et les décisions seront fondées sur l’information la plus récente. Les renseignements contenus dans les présentes ont été puisés à des sources jugées fiables au moment où ils ont été obtenus. Le présent rapport ne constitue pas une offre de vente ni une sollicitation d’offre d’achat de titres et ne doit en aucun cas être interprété comme telle. Les portefeuilles de RBC Dominion valeurs mobilières inc. peuvent parfois inclure des titres mentionnés dans les présentes. Dans la mesure permise par la loi, ni RBC Dominion valeurs mobilières, ni les sociétés qui lui sont affiliées, ni toute autre personne, n’acceptent de responsabilité quant à toute perte directe ou indirecte découlant de l’utilisation du présent rapport ou des renseignements qui y sont contenus. Le présent document ne peut être reproduit ou copié de quelque manière que ce soit sans le consentement écrit préalable de RBC DVM, obtenu avant chaque reproduction ou copie. RBC Dominion valeurs mobilières inc.* et la Banque Royale du Canada sont des entités juridiques distinctes et affiliées. * Membre-Fonds canadien de protection des investisseurs. RBC Dominion valeurs mobilières inc. est une société membre de RBC Gestion de patrimoine, division opérationnelle de Banque Royale du Canada. ®/MC Marque(s) de commerce de Banque Royale du Canada utilisée(s) sous licence. © RBC Dominion valeurs mobilières inc., 2024. Tous droits réservés. 24_90083_2224