Que nous réservent les actions britanniques et européennes ?

09 février 2023 | Frédérique Carrier


Partager

Les marchés boursiers du Royaume-Uni et de l’Europe demeurent plus abordables que ceux des États-Unis, bien que certains segments intègrent un scénario trop optimiste.

man sitting at computer pausing from work

Un redressement spectaculaire

Les marchés boursiers du Royaume‑Uni et de l’Europe ont grimpé allègrement depuis leurs creux d’il y a six mois. À ce moment‑là, l’anxiété était à son comble, à juste titre.

Le Royaume‑Uni était plongé dans la tourmente du plan économique mort‑né de l’ancienne première ministre Liz Truss, et l’agitation boursière menaçait d’engloutir le secteur des régimes de retraite. En Europe, les gouvernements redoutaient des pénuries d’énergie, croyant que la guerre en Ukraine paralyserait de vastes pans du complexe industriel durant l’hiver.

Depuis, l’arrivée d’un nouveau gouvernement a redonné une certaine stabilité au Royaume‑Uni, tandis qu’en Europe, le temps doux et les stocks abondants de gaz naturel ont rendu les pénuries peu probables.

Dans les deux cas, une crise a donc été évitée. Et les bonnes nouvelles ont continué d’affluer. Les prix de gros du gaz naturel ont reculé, ce qui a profité aux deux régions et ravivé l’espoir d’un plafonnement prochain de l’inflation. Les taux des obligations ont diminué par rapport à leur sommet de l’automne, soutenant ainsi les valorisations des actions. Pour l’Europe, le redémarrage de l’économie chinoise, à laquelle la région est fortement exposée du fait des exportations, donne un coup de pouce additionnel. Ainsi, la confiance des entreprises et le climat économique se sont améliorés trois mois de suite en Europe.

Le pire scénario économique étant écarté, le plafonnement des taux des obligations et les positions modérées dans les deux régions ont entraîné un rebond prononcé des actions, grâce au retour des investisseurs institutionnels. L’indice toutes les actions FTSE et l’indice MSCI Europe hors Royaume‑Uni ont gagné respectivement 17 % et 22 %, en monnaie locale, depuis les creux enregistrés l’automne dernier.

Redressement des indices du Royaume‑Uni et de l’Europe par rapport à leurs creux
Indice toutes les actions FTSE et indice MSCI Europe hors Royaume-Uni, de mars 2018 au 8 février 2023

Le graphique linéaire illustre l’évolution de l’indice toutes les actions FTSE et de l’indice MSCI Europe hors Royaume-Uni, de mars 2018 au 8 février 2023. Les deux indices ont reculé en 2022. L’indice FTSE a réagi à une politique économique impopulaire au Royaume-Uni, tandis que l’indice MSCI a subi le contrecoup des craintes d’une pénurie d’énergie, en raison de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Les deux indices ont remonté à vive allure depuis la fin de 2022.


Indice MSCI Europe hors R.‑U. (g.)

Indice toutes les actions FTSE (dr.)

Sources : RBC Gestion de patrimoine, Bloomberg ; données prises en compte jusqu’au 8 février 2023.

Des perspectives peu encourageantes malgré les reprises

Même si les crises ont été évitées au Royaume‑Uni et en Europe, les conditions économiques resteront sans doute moroses.

Le Fonds monétaire international estime qu’en 2023, le Royaume‑Uni tombera en queue de peloton des économies avancées, se classant même derrière la Russie. Il prévoit une contraction de 0,6 % en raison des difficultés que nous soulignons depuis des mois, soit la pénurie d’énergie, la crise du coût de la vie, les taux d’intérêt très élevés et les conséquences du Brexit.

Le gouvernement britannique a annoncé qu’il procéderait comme prévu à l’augmentation des prix de l’énergie en avril 2023, de sorte que la crise du coût de la vie n’est pas près de se terminer. Les taux d’intérêt ont atteint 4 % et pourraient augmenter encore un peu, alors qu’ils se situaient à seulement 0,1 % en décembre 2021. Les marchés prévoient que la Banque d’Angleterre pourrait les abaisser légèrement d’ici la fin de l’année, mais la politique monétaire demeurera probablement restrictive un bon moment. La hausse des impôts et la fin des mesures de relance budgétaire complètent ce sombre tableau.

En Europe, l’activité économique reprend rondement. L’indice composite des directeurs d’achats (PMI) de la zone euro a atteint 50,2 en janvier alors qu’il était à 49,3 en décembre : c’est son niveau le plus élevé depuis juin 2022. Les prévisions moyennes du produit intérieur brut (PIB) pour 2023 établies par Bloomberg ont légèrement augmenté ; elles tablent maintenant sur une croissance de 0,15 %, au lieu d’une contraction de 0,1 % comme au début de l’année.

Toutefois, comme la Banque centrale européenne (BCE) mène une politique monétaire rigoureuse, ayant déjà annoncé un autre relèvement de 50 points de base, la trajectoire des taux d’intérêt est clairement orientée à la hausse. Contrairement à la Réserve fédérale, dont le double objectif du plein emploi et d’une faible inflation lui donne une certaine marge de manœuvre, le mandat de la BCE vise uniquement l’inflation. Les taux d’intérêt devraient donc être maintenus tant que l’inflation de base dépasse largement la cible de 2 %.

Selon les prévisions générales de Bloomberg, les taux grimperont jusqu’à 3,5 %, un niveau élevé pour une économie qui a fonctionné avec des taux d’intérêt négatifs pendant huit ans. La plupart des pays ont imposé des plafonds sur les prix de l’énergie jusqu’en avril 2024 ; c’est peut‑être trop court pour donner aux entreprises la confiance nécessaire pour investir.

Risque pour les bénéfices

Au Royaume‑Uni et en Europe, les bénéfices des sociétés ont résisté jusqu’à présent, profitant de la demande accumulée durant la pandémie et de l’épargne considérable des consommateurs dopée par les mesures de stimulation budgétaire. Grâce à ce contexte, les sociétés ont pu répercuter la hausse des coûts des intrants, propulsant les marges à des sommets inégalés.

La situation a toutefois changé. La majeure partie de la demande accumulée a été satisfaite ; la plupart des problèmes des chaînes logistiques se sont réglés d’eux‑mêmes et les stocks ont été reconstitués. Le pouvoir d’établissement des prix des sociétés pourrait donc s’effriter, d’autant plus que les préférences des acheteurs semblent de plus en plus aller aux produits les moins chers. Mais surtout, le resserrement de la politique monétaire produira ses effets à retardement, ce qui tempérera la demande, d’après nous. Le déclin des revenus pourrait se traduire par une réduction des marges pour les sociétés ayant des frais fixes importants. Bref, les révisions à la hausse des bénéfices seront vraisemblablement rares.

Une pause rafraîchissante ?

Les gains faciles des marchés boursiers sont peut‑être derrière nous et le contexte économique demeurera probablement difficile en Europe et encore plus au Royaume‑Uni. Une confiance excessive s’est peut‑être installée : l’indice VDAX, qui mesure la volatilité de l’indice boursier allemand, est à son niveau le plus bas depuis janvier 2022. Enfin, la situation géopolitique, à savoir les tensions entre les États‑Unis et la Chine, pourrait faire obstacle à court terme.

On s’attend à un retour des capitaux, après plusieurs mois de reflux de la part des investisseurs institutionnels l’an dernier, en raison des perspectives maussades. Les valorisations globales de l’indice toutes les actions FTSE et de l’indice MSCI Europe hors Royaume‑Uni demeurent attrayantes, se situant respectivement à 10x et 14x les bénéfices prévisionnels de 2023, ce qui est bien inférieur à celles observées aux États‑Unis. Elles devraient donc continuer de susciter l’intérêt des investisseurs.

Certains segments du marché paraissent cependant surévalués. Selon notre fournisseur de recherche nationale, les titres cycliques non financiers européens semblent intégrer un taux de croissance du PIB de plus de 4 %. En outre, il soutient que les valorisations des actions de sociétés européennes qui exportent des biens d’équipement en Chine se situent à un sommet record par rapport au reste du marché.

Nous croyons que la faiblesse des valorisations comparativement aux États‑Unis justifie des placements au Royaume‑Uni et en Europe pour diversifier les portefeuilles à l’échelle mondiale. Nous recommandons toutefois d’être sélectif et de ne pas courir après le redressement. Plus que jamais, le vieil adage voulant que la patience de l’investisseur soit récompensée se confirmera probablement.


Ressources pour les recherches 

Déclarations exigées 

Au Québec, les services de planification financière sont fournis par RBC Gestion de patrimoine Services Financiers. qui est autorisé comme une société de services financiers dans cette province. Dans le reste du Canada, les services de planification financière sont disponibles à travers RBC Dominion valeurs mobilières.