Tourbillon de volatilité

07 mars 2025 | Kelly Bogdanova


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La période marquée par une déferlante d’événements a évidemment mis les investisseurs sur la corde raide. Nous déchiffrons cinq catalyseurs qui tirent sur les marchés boursiers et expliquons pourquoi nous ne sommes pas prêts à dire que le marché haus

Tourbillon de volatilité

La volatilité des marchés boursiers américains a bondi récemment et les principaux indices se sont repliés. Au moment d’écrire ces lignes, l’indice S&P 500 était en recul de 6,6 % par rapport à son sommet historique de la mi-février, cinq des sept merveilles (Alphabet, Amazon, Apple, Meta, Microsoft, NVIDIA, Tesla) ayant enregistré une contreperformance. L’indice Nasdaq, fortement axé sur les technologies, a perdu 9,8 % au cours de la même période.

Cinq facteurs ont fait fluctuer le marché

Les avis concernant le programme économique de l’équipe de M. Trump, qui étaient positifs, se sont dégradés : Lorsque le président américain Donald Trump a remporté l’élection, de nombreux intervenants du marché se sont réjouis de la possibilité que les taux d’impôt peu élevés soient prolongés et que des déréglementations généralisées soient mises en œuvre, car les deux étaient (et sont toujours) perçus comme des initiatives favorables à la croissance économique et aux marchés boursiers.

Maintenant, Wall Street éprouve un malaise devant le programme économique du président au lendemain de l’imposition de tarifs douaniers élevés au Canada et au Mexique, de l’imposition de tarifs supplémentaires à la Chine et des déclarations de l’équipe de Trump selon lesquelles des annonces d’importants droits de douane « réciproques » sont prévues pour avril. La nervosité du marché a persisté jeudi, malgré la nouvelle qu’un report des droits de douane avait été décrété pour les importations canadiennes et mexicaines jusqu’au 2 avril.

Auparavant, Wall Street semblait partir du principe que tout tarif important servirait principalement de levier de négociation et serait de courte durée. Désormais, certains intervenants du marché ne sont plus aussi certains.

De plus, les annonces discordantes de l’équipe Trump à propos des droits de douane ont créé des incertitudes, et le marché n’aime pas les incertitudes.

Eric Lascelles, économiste en chef de RBC Gestion mondiale d’actifs inc., croit toujours qu’il est plus probable qu’improbable que la majeure partie des droits de douane soient de courte durée, mais ceux-ci comportent tout de même des risques économiques. Plus les tarifs élevés resteront en vigueur longtemps, plus l’incidence négative sur la croissance et l’inflation du PIB aux États-Unis sera grande, et plus le PIB du Canada et du Mexique sera touché durement, selon les estimations de M. Lascelles.

Nous sommes également conscients que Donald Trump pourrait surestimer son jeu. Comme l’écrivait notre collègue Atul Bhatia dans cet article fort intéressant, « advenant que les autres pays subissent trop de pressions, les États-Unis pourraient finir par déclencher une guerre commerciale en supposant qu’elle sera résolue rapidement et favorablement, alors qu’elle traînera en longueur. Une telle situation pourrait mener à un ralentissement de la croissance économique mondiale. Il ne s’agit pas de notre scénario de base, mais il ne faut pas le rejeter du revers de la main. »

Pour creuser la question, nous recommandons l’article de M. Bhatia sur les réalités qui motivent la stratégie tarifaire de Donald Trump, un autre article de RBC Gestion de patrimoine qui se penche sur les répercussions économiques des tarifs et qui présente les estimations de M. Lascelles en fonction de divers scénarios, et un article (en anglais) de Services économiques RBC qui traite des droits de douane qui annoncés pour le Canada, le Mexique et la Chine plus tôt cette semaine, avant les nouvelles du report.

Les données économiques pour le premier trimestre se sont détériorées : Plusieurs données économiques se sont aggravées au moins modérément, notamment des mesures de l’inflation, de la confiance des consommateurs, des ventes au détail et de l’activité du secteur des services ainsi que différents indicateurs de l’emploi.

Même si certaines de ces dégradations auraient pu se produire malgré les décisions de M. Trump, nous sommes d’avis que les incertitudes suscitées par les droits de douane ont pesé sur les indicateurs de confiance et fait bondir les attentes quant à l’inflation.

Malgré les données plus faibles, les prévisions consensuelles des économistes à l’égard de la croissance du PIB au premier trimestre n’ont fléchi que légèrement, passant du pic de 2,25 % en janvier à 2,17 % actuellement (cette prévision est habituellement lente à s’ajuster). Toutefois, certains indicateurs qui tentent de prévoir la croissance en temps réel en tenant compte des nouvelles données économiques ont été mis à mal. Par exemple, les prévisions de croissance du PIB pour le premier trimestre selon le modèle très suivi GDPNow de la Réserve fédérale d’Atlanta se sont renversées, passant de +2,32 % à -2,41 % la semaine dernière seulement (ces prévisions sont sujettes à changement à mesure que de nouvelles données sur le premier trimestre sont prises en compte).

Pour l’instant, M. Lascelles estime que les dommages au premier trimestre ne seront pas aussi importants que certains le redoutent en ce moment. Mais dans le passé, l’indicateur de la Réserve fédérale d’Atlanta a été un bon guide de l’orientation – soit que s’il évolue beaucoup dans une direction ou dans l’autre et qu’il diffère largement des prévisions consensuelles, c’est habituellement une indication que les prévisions consensuelles ont tort.

Des préoccupations concernant la croissance du PIB pour l’ensemble de l’année 2025 se sont manifestées : L’idée que le PIB au premier trimestre pourrait être faible ou pire que prévu a soulevé la possibilité que la croissance du PIB pour l’ensemble de l’année 2025 soit inférieure aux prévisions des analystes de 2,28 %, surtout si des droits de douane élevés demeurent en place.

Bien que nous ne prévoyions pas de récession dans l’immédiat (article en anglais), le taux de croissance du PIB est important pour le marché.

La chef de la Stratégie sur actions américaines de RBC Capital Markets, LLC, Lori Calvasina, souligne que, historiquement, le point idéal pour les actions américaines a été lorsque la croissance annuelle du PIB s’est établie entre 2,1 % et 3,0 %, soit le niveau idéal, pas trop haut, ni trop bas. Selon Mme Calvasina, ce niveau est propice à de solides revenus et bénéfices des sociétés, ainsi qu’à des investissements en immobilisations et à l’innovation. Toutefois, lorsque la croissance du PIB glisse dans une fourchette de 1,0 % à 2,0 %, souvent, le marché vacille, car les ventes, les bénéfices et les dépenses en immobilisations diminuent.

Nous sommes d’avis que le risque d’une croissance du PIB anémique inférieure à 2 % en 2025, combiné à une inflation élevée, a augmenté.

Les actions liées à l’IA ont trébuché : Les préoccupations à l’égard des actions liées à l’intelligence artificielle (IA), qui représentent une part importante de la capitalisation boursière de l’indice S&P 500, ont également pesé sur l’ensemble de l’indice.

Les actions de six des sept merveilles ont trébuché après la publication de leurs résultats trimestriels, et certaines sont tombées sous les niveaux des principales données techniques. Les résultats ou les prévisions de segments importants n’ont pas été à la hauteur des attentes très élevées des investisseurs qui avaient été intégrées aux cours et aux valorisations des actions.

Nous nous attendons à ce que les chefs de file américains de l’IA continuent de faire l’objet d’une étroite surveillance au cours des prochains trimestres, car les investisseurs voudront voir ce qu’ils gagnent à investir dans eux, c’est-à-dire que ces chefs de file devront commencer à montrer des perspectives tangibles de rendement du capital investi dans leurs projets d’IA, surtout compte tenu du fait que leurs valorisations par rapport leurs ratios cours-bénéfice semblent toujours élevées.

Les prévisions de croissance des bénéfices semblent vulnérables aux révisions à la baisse : À notre avis, tous ces facteurs compromettent la croissance des bénéfices attendue par les analystes, qui visent 271 $ par action pour 2025. Cette estimation a décliné par rapport aux attentes de 273 $ par action à la mi-janvier. Si les estimations des économistes, qui tablent sur une croissance du PIB de 2,28 % en 2025, se détériorent considérablement, nous pensons que les prévisions consensuelles diminueront davantage.

Mettre l’accent sur la qualité

Nous ne sommes pas prêts à dire que le marché haussier qui dure depuis plus de deux ans est terminé. Pendant la récente baisse, l’humeur des investisseurs est devenue assez négative, ce qui est souvent un indicateur à contre-courant. De plus, les mesures de l’envergure du marché (qui suivent la proportion des actions qui montent par rapport à celles qui baissent) ne se sont pas dégradées de façon notable au sein de l’indice S&P 500, mais elles s’affaiblissent pour les actions à petite capitalisation.

Cependant, nous pensons que les investisseurs devraient se préparer à une volatilité accrue en raison des risques liés à l’économie et à la croissance des bénéfices et des incertitudes entourant les politiques de Washington, d’autant plus que d’autres droits de douane majeurs pourraient être imposés. Selon nous, ce n’est pas le moment de surpondérer les actions dans les portefeuilles.

Nous maintiendrions notre engagement envers les actions jusqu’aux niveaux de la répartition de l’actif cibles à long terme, mais pas au-delà – autrement dit, nous maintiendrions une pondération des actions similaire à celle du marché. Nous estimons que cette période d’incertitude est un bon moment pour rehausser les placements boursiers de qualité, en mettant l’accent sur les sociétés qui augmentent leur dividende.


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